Comme je l‘évoquais dans un précédent article, vous êtes de plus en plus nombreux à nous écrire sur les «Les maux de Sab», à nous faire confiance en nous racontant vos histoires. Ces histoires qui touchent les gens, qui témoignent d’une grande force et qui souvent sont bénéfiques et servent d’exemple et de leçon de vie. Alors encore une fois pour tout ça merci à vous ! Avec Jenny qui gère tout le travail avec moi, nous nous passionnons pour vos histoires et encore plus quand nous voyons, après publication, qu’elles sont utiles quelle que soit la façon dont elles sont bénéfiques, nous en sommes d’autant plus fières. On dit que la critique est constructive, sachez que vos remarques sont toujours les bienvenues …

Il y a quelques semaines de cela nous avons reçu un mail sur le site et j’avoue que j‘étais loin de m’imaginer tirer une leçon de ce message … Celui-ci avait pour but de féliciter le site et les beaux messages qu'il véhicule par les témoignages que l’on peut y lire. Suivi d’une critique assez surprenante qui a attiré toute mon attention sur le fait de ne pas parler des maladies invisibles, et c’est une bonne remarque en effet.

 Non pas que je ne connaisse pas le sujet mais depuis le démarrage des « Maux de Sab », nous essayons au mieux, sur le site, de vous faire partager des parcours et des beaux combats en essayant de rester positifs, dans le but de faire connaître et sensibiliser sur des maladies qui continuent de tuer bien trop de fois. Je me rends compte que le site n’est pas vieux mais jusqu’à aujourd’hui, nous n’avons pas eu l’occasion d’évoquer une autre forme de maladie grave dont on parle peu, celle qu’on peut parfois « juger » et pourtant elle est tout autant assassine à l’intérieur de soi : il s’agit de la dépression sévère ou majeure associée à des troubles anxieux et je remercie So’ de nous avoir souligné cette remarque et d’avoir eu le courage d’écrire ce témoignage percutant.

Voici son histoire :

Moi-même quand on me disait qu'une personne était dépressive, je me disais : elle a qu’à se bouger le cul ! Mais c'est tellement bête de dire ça, car maintenant je suis à la place de cette personne, je ressens les choses de l'intérieur, ces douleurs que nous seuls ressentons..

Il n'est pas toujours facile de mettre des mots sur ces sensations, certains aspects des problèmes sont difficiles à comprendre pour certains. Alors voilà, tout a commencé le 9 mai 2014, j'avais 19 ans. Je finissais mon BTS à cette époque. C'était un vendredi, je partais en week-end avec mon petit ami chez son père qui habite à plus d'une heure de chez moi.

Au moment de se coucher, je n'arrivais pas à m'endormir. Puis, d'un coup, j'ai ressenti de fortes douleurs dans le ventre, j'avais du mal à respirer, j'avais chaud, froid, puis tout mon corps a commencé à trembler sans pouvoir s'arrêter. J'ai essayé de réveiller mon copain mais il ne m'écoutait pas quand je lui disais que je me sentais très mal. Je me suis levée, je suis sortie prendre l'air. Ça ne passait pas. Je me sentais vraiment mal de l'intérieur mais les personnes autour de moi ne pouvaient pas imaginer ce que je ressentais. J'ai passé la nuit devant la télé en attendant que mon père vienne me chercher au petit matin.

 

Depuis ce jour ma vie a complètement changée.

 J'avais fait une attaque de panique. Je ne savais pas ce que c'était et je pensais que tout irait mieux en rentrant chez moi. Les jours passaient et je ne pouvais plus sortir de chez moi car je ressentais toujours un mal-être intérieur. Cette sensation tellement désagréable impossible à décrire. J'ai annulé 2 jours avant les vacances qui étaient prévues avec mon copain en juillet. Je pensais que je devenais folle, j'avais l'impression que quelque chose avait lâché dans ma tête..

Alors j'ai commencé à voir un psychologue, puis un psychiatre et à prendre des médicaments anti-dépresseurs et anxiolytiques.. je me suis inscrite à une formation par correspondance afin de faire quelque chose de mes journées. Mon copain ne supportait plus de me voir comme ça, on ne faisait plus rien ensemble je ne pouvais plus aller dormir chez lui ni aller faire du shopping. Tout est devenu une épreuve . L'hiver a entaché mon moral et ce qui devait arriver arriva : mon copain m'a quitté quelques jours avant la Saint Valentin après 7 ans de relation... Je me suis effondrée, il était mon pilier, mon repère, j'ai grandi avec lui, on avait tout partagé depuis l'âge de mes 14 ans. J'allais déjà très mal mais la rupture m'a achevée.. J'ai appelé mon psychiatre en urgence et dès le lendemain je me suis faite hospitaliser dans une clinique privée spécialisée dans la dépression et les troubles anxieux où je suis resté deux mois. J'étais détruite, je n'arrivais pas à avancer. Les mois passent, les médicaments augmentent. J'ai changé de traitement plusieurs fois car j'avais des effets secondaires insupportables. J'ai fini par me remettre de cette rupture.

Mon état s'était stabilisé durant l'été 2015, mais je passais mes journées chez moi à ne rien faire. Impossible pour moi de sortir, voir mes amies ni d'aller travailler.

Les médicaments fatiguent beaucoup. J'ai donc pris l'habitude de faire des siestes l’après-midi, 2 h ou 3 h à dormir pour passer plus vite ma journée. A l’arrivée de hiver 2015, mon état s'est de nouveau dégradé, c'était vraiment horrible. C'est tellement difficile de se sentir mal dans sa tête puis dans son corps.

Le manque d'activité et les médicaments font grossir j'ai pris 15 kg depuis le début. Au mois de décembre j'ai dis droit dans les yeux a mes parents: 

"papa maman je n'ai plus envie de vivre".

 Mon père a fondu en larmes. Je pleurais sans pouvoir m'arrêter. J'avais des idées noires, j'ai sérieusement réfléchi au suicide car malheureusement je ne pouvais plus vivre comme ça, j'avais envie de m'endormir pour toujours car le combat contre la dépression est bien trop dur pour mes petites épaules. La seule chose qui m'a empêché de passer à l’acte, c'est ma famille. Je ne pouvais pas les abandonner même si je me disais qu'ils seraient soulagés de ne plus me voir souffrir. Mais non un parent ne peux pas accepter que son enfant souffre sans rien pouvoir faire pour l'aider. Les fêtes de fin d'année ne furent pas joyeuses pour moi.

 Début janvier 2016, je consulte mon psychiatre et demande une nouvelle hospitalisation pour éviter de faire une bêtise. J'y passe de nouveau 2 mois. J'en ressors en mars, mieux dans ma tête avec un traitement encore plus lourd. Il y a des jours avec et des jours sans. Ce n'est pas toujours facile de vivre avec cette maladie car oui c'est une maladie au même titre que le cancer ou autre. Il faut sans cesse lutter contre son moral et ne pas baisser les bras, il faut toujours se battre contre ce mal invisible. Chose très difficile à comprendre pour les proches. Mon psychiatre m'avait alors conseillé de leur faire lire un livret sur la dépression issu du site info dépression.

 Aujourd’hui, je ne suis pas guérie car je pense que l'on ne guérit jamais de la dépression. Je continue de me battre. Il est très important d'être entourée par des professionnels mais aussi par sa famille et des amis. C’est indispensable. Je passe mes semaines chez moi, je n'ai pas encore retrouvé la motivation pour travailler sur mes cours. Parfois, même prendre une douche devient une épreuve. Il faut trouver la force de refaire des choses de la vie de tous les jours. J'ai des rendez-vous réguliers chez le psychologue, la psychothérapeute, la psychiatre. J'ai essayé l'hypnose qui malheureusement pour moi, n'a pas eu d'effet. Je sors rarement de chez moi sauf pour aller chez ma famille ou faire quelques courses près de chez moi. Mes amies sont obligées de venir me voir chez moi bien souvent car je ne me sens pas capable de sortir. Le seul moyen de sortir pour moi c'est d'être avec ma mère. Elle est ma sécurité. Avec elle, je peux faire beaucoup de choses. Pendant mes séances de psy, j'apprends beaucoup de choses sur moi-même, sur l'inconscient qui a un pouvoir immense sur nous ! On analyse chaque source de stress et trouvons des explications dues à mon passé et mon enfance. Mais cela n'arrange pas les angoisses. Je cherche encore des solutions. Je fais encore des crises d'angoisse de temps en temps et j'évite toute situation qui me procure du stress. C'est devenu un vrai handicap dans ma vie.  Par exemple, pour trouver l'amour, je suis incapable d'aller a un rendez-vous amoureux malgré toute l'envie. La peur prend toujours le dessus sur le désir. Je me sens faible et je considère que je ne suis pas quelqu'un de normal. Heureusement, j'ai une famille et des amis très compréhensifs qui me soutiennent énormément. J'ai surement oublié de parler de certaines choses mais ce n'est vraiment pas facile à expliquer tout cela. Ne jugez pas une personne dépressive car ce n'est pas elle qui l'a décidée. Et pour les personnes à qui ça arrive, je vous souhaite tout mon courage et surtout battez vous !

 

N'abandonnez jamais. Même si pour nous le ciel est gris il y a parfois des petits rayons de soleil.

 

Je pense que, tout comme moi, cet article fait clairement réfléchir et nous envoie une grosse leçon, j’imagine à quel point on doit se sentir incomprise.

 Mon mot pour So’ :Je te souhaite avant tout de retrouver goût à cette vie que je trouve merveilleuse malgré des épreuves qui me donnent souvent envie d’hurler ma haine et de tout envoyer valser …Je ne pense pas que ça soit comparable .Je n’ai pas tes souffrances mais lorsqu’on perd un proche, on ressent cette horrible douleur de l’intérieur. Cette douleur s’apaise avec le temps alors je me mets à ta place qui vit avec une même violente douleur qui a du mal à te quitter et là, je réalise …

Je te souhaite de trouver la force de sortir et d’en finir avec ce mal qui te ronge.

Je te souhaite re-parcourir le monde, la vie, de retrouver l’amour et d’un jour pouvoir sourire pleinement à tout ce qui s’offre à toi.

Car une vie, on n’en n’a qu’une et il n’est jamais trop tard pour recommencer la sienne alors ne baisse pas les bras …Merci à toi de m’avoir ouvert les yeux et de m‘avoir permis, à travers ton témoignage, de revoir mon jugement et d’avoir pris conscience que cette maladie mentale fait parfois bien plus mal qu’une douleur physique. Comme je te le disais, le fait de réussir à en parler est déjà un pas vers une petite victoire et ton témoignage servira, je n’ai aucun doute là-dessus .

Mon mot de fin :

Je suis d’une nature assez dure et tout comme So’, j’ai tendance à réagir de façon brutale face à quelqu’un qui souffre d’une dépression .J’ai envie de dire « bouges-toi , tu vas jamais t’en sortir si tu ne fais rien … arrêtes de pleurer sur ton sort …"

Mais en vérité qui suis-je pour juger ?

Qui me dit que demain ça ne sera pas moi ? Après tout, je ne suis pas en fer et ça peut me tomber dessus aussi ! Alors même si on se sent impuissant face à cette maladie qui en est une, et face à ces personnes qui souffrent que nous pouvons rencontrer, une chose est certaine, on ne doit jamais juger, personne n’est intouchable , personne ….